•  

    La vieille Jeanne regarde avec compassion Lukas qui vient de s’endormir dans l’alcôve aménagée au fond de la pièce unique. Assise à la table près du lit, elle trie les plantes qu’elle a cueillies le matin. Tout est calme, seule l’horloge martèle le compte à rebours de l’après-midi qui s’achève et rythme la respiration du jeune homme.   


    Quand il est revenu de la clairière, les mains et les vêtements rougis du sang de la louve, choqué et le regard égaré, il s’est assis sur la marche et est resté prostré de longues minutes, tremblant  et incapable de prononcer un mot. A force de patience et de douces paroles, la vieille Jeanne a réussi à lui faire avaler une tisane sédative de son cru. Peu à peu il s’est calmé, puis a accepté de se laver devant la cheminée. Le bain chaud a achevé de le détendre.  


    Jeanne a savonné ses vêtements souillés puis les a étendus dehors sur les buissons. Ils finiraient de sécher pendant la nuit, au matin ils seraient prêts. Elle a donné à Lukas une vieille et longue chemise d’homme pour se vêtir avant de se coucher, puis elle l’a laissé dormir ce qu’il avait besoin. Tard dans la soirée elle s’est glissée sous le drap sans le réveiller et est restée sur le bord du matelas, pour ne pas prendre trop de place. 

     

    Blog de lukasloup : Lukas, coeur de loup, Episode 45


    ~~~o~~~

    Trois jours s’écoulèrent pendant lesquels Lukas tenta de digérer les durs évènements passés. Il eut également le temps de réfléchir à l’existence qu’il allait mener durant ces prochains mois. Ce serait pour lui comme une parenthèse, une petite année d’exil tout au plus pour revenir aux Forges, encore plus fort.

    Le temps que les villageois hostiles examinent peut-être leur conscience et s’interrogent sur le caractère sacré de toute vie et que naisse en leur cœur un brin de remords, à défaut de bonté et d’amour. Le temps aussi que son père malade, miné par sa haine et son ressentiment rende l’âme, victime de ses propres pensées destructrices.

    Il confia également à la vieille femme son tendre attachement pour Thilde, qui n’en parut guère étonnée, ainsi que ses rêves d’avenir à ses côtés. De longues conversations à cœurs ouverts meublaient ce temps de repos. 


    Elle lui parla un peu d’elle et de cet homme qu’elle avait aimé dans un lointain passé, parce que Lukas s’étonnait de cette vieille chemise élimée. La guerre lui avait enlevé cet amour, et elle avait choisi de rester seule. Personne aux Forges ni dans les hameaux alentours ne connaissait rien de la vie de la Jeanne, ni quand exactement elle s’était installée aux bois des Groppes, comme si d’ailleurs elle avait toujours été là.  


    Le troisième soir, il lui fit part de sa décision soigneusement réfléchie et par ses paroles prouva encore une fois son étonnante maturité. 

    "Je sais parfaitement que je ne peux rester vivre avec toi... d’ailleurs, même si tu me le proposais, je refuserais... Je dois travailler pour gagner ma vie. Je vais aller de village en village proposer mon aide aux paysans contre un toit et quelques repas ou quelques pièces... Je partirai dans deux jours, en direction du sud... Ne t’inquiète pas pour moi..."


    Jeanne prit ses mains dans les siennes et les serra affectueusement en lui souriant. Non, elle ne se faisait aucun souci pour lui, il était courageux et volontaire, elle avait confiance. 

    - Ce soir à la nuit je rendrai visite à Clothilde... Je ne peux pas partir sans la revoir, sans lui dire que je reviendrai... En attendant, je vais te couper du bois...  

    ********

     

     

    « »

    Tags Tags : , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :