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    Il recommença sa lecture encore, encore et encore.
    C’était comme un chant désespéré, un aveu d’amour à mort,
    quelques larmes de sang perlant d’un cœur meurtri.

     

     

     


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  • Il sort de sa tanière, hume l’air frais de l’aube. La douleur se fait dure et lui broie les entrailles ; il reconnaît la faim dans sa carcasse creuse. Sa gueule se souvient de la chair tendre et chaude qui apaise sa chair et donne la vigueur. Dans la lumière grise du sous-bois embrumé, il tend le cou et hurle pour rassembler les siens. Il est temps de partir, il ne peut plus attendre. Il se met à courir et sous ses larges pattes un relent d’humus froid monte des feuilles humides. Rôder pendant des heures, poursuivre ventre à terre une odeur animale et sacrifier la vie. Ses frères sont à la traîne, ils n’ont pas son ardeur… Le museau en avant il s’élance et bondit sans se préoccuper des ronces acérées. Les épines traîtresses écorchent ses oreilles et les branchages bas fouettent ses flancs meurtris. Peu importe... il le sent... il approche...
    Il entrouvre sa gueule et affûte ses crocs, ses babines froncées laissent écumer sa bave.

    Dans sa fuite inutile, l’animal traqué sait bien qu’il est perdu. Dans un ultime effort il étire son corps pour vivre encore un peu ; juste le temps d’un râle. Alors il abandonne car dans un éclair noir la mort s’abat sur lui, il n’est plus qu’une proie…

    Il a broyé la gorge de ses mâchoires solides et le goût du sang chaud adoucit sa torture. Il serre encore un peu pour briser cette vie puis lâche son butin. Il flaire la dépouille puis relève la tête vers les frondaisons où le soleil miroite, pour appeler ses frères d’un hurlement glorieux.
    Il les entend là-bas mener leur sarabande, et leurs chants qui ricochent lui arrivent par vagues. Son cœur ne gronde plus ; il redevient paisible…
    Seul un goût âcre imprègne sa langue mais la rivière est loin… Il lèche la blessure d’une patte écorchée… Soudain, il se sent aspiré….

                                      ….et un violent sursaut le ramène… le sang cogne à ses tempes et son corps est en sueur… Il s’extirpe de son rêve avec peine et regrets. L’envie de s’ébrouer lui parcourt l’échine, mais il se recroqueville et son corps ramassé frissonne… Il a froid tout d’un coup ; la peau tendre a remplacé l’épais pelage… Il serre ses bras croisés contre sa poitrine et étreint ses épaules entre ses doigts crispés. Dans ses narines flotte encore une odeur de mousses arrachées, un effluve d’ailleurs… Comme un parfum de nostalgie d’une autre vie, celle où il était loup, il y a bien longtemps, sûrement des millénaires. Une vie parmi tant d’autres, celles de Lukas, cœur de loup.

     

     

    Extrait de Lukas, coeur de loup

    Je publie cet extrait     à part car il est particulier à mes yeux. Parce que lorsque je l'ai écrit les mots ont coulé tout seuls de ma plume, en quelques minutes à peine, c'était comme si je les entendais en mon for intérieur et qu'il ne me restait plus qu'à les retranscrire. Comme s'ils m'étaient dictés.  

     


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